La BCE s’est livrée ce jeudi à un exercice pour lequel elle est parfaitement rodée, et dans lequel elle excelle : publier un communiqué (qui est une œuvre collective) qui ne fait pas de vague et est de nature à rassurer les marchés, Christine Lagarde se bornant à développer certains points sans déborder du schéma initial.
Compte tenu de l’absence complète de réaction des investisseurs devant ce numéro d’équilibriste, c’est un « sans faute » de la banque centrale et de sa présidente. A moins que tout le monde n’ait pris connaissance du premier jet du communiqué en début de semaine.
La rumeur avait couru ce matin sur des networks financiers anglo-saxons que la BCE évoque un nouveau plan de soutien monétaire de 1 350Mds€ pour doper la reprise. Et pour cause : il n’a pas échappé à Christine Lagarde que le rythme de la reprise reste un peu inférieur aux prévisions, sur fond d’incertitudes persistantes liées au niveau de la consommation (en cas de résurgence de la pandémie) et à celui de l’investissement (globalement au point mort depuis six mois).
Service minimum
La BCE s’est cependant contentée de réaffirmer qu’un important soutien monétaire reste nécessaire (comme dans chacun de ses précédents communiqués), mais sans s’avancer sur le moindre montant.
En ce qui concerne les anticipations, elle confirme que le PIB de l’eurozone devrait reculer de 8% en 2020, et ne progresser que de 5% l’an prochain (le marché espérait plutôt un chiffre proche de +6%) et de 3,2% en 2022… soit en réalité trois années sans croissance.
Déception également du côté de l’inflation, limitée à +0,3% cette année (c’est toujours mieux que les -0,4% actuels), à +1% en 2021 et à +1,3% en 2022. Christine Lagarde a par ailleurs indiqué que les variations de change devraient contribuer à contenir l’inflation, ce qui induit une certaine robustesse de la monnaie unique face au dollar et face au yuan.
Toujours sur le plan de la hausse des prix, la BCE n’a en fait jamais été aussi éloignée de son objectif des 2% depuis la création de l’euro… et elle ne fixe même pas d’horizon de temps pour y parvenir. Tout juste estime-t-elle qu’un tel scénario est peu probable avant 2024.
De leur côté, les marchés ne semblent pas partager ses projections, attendu que les taux long remontent doucement, mais irréversiblement depuis la mi-août.