C’est ce qui attend l’Amérique ce 15 mars : le plafond de la dette US va être relevé au-delà des 20 000 milliards de dollars et son coût de refinancement va être accru de 0,25 point de base par la Fed d’ici la fin de la semaine.
Le Congrès va sûrement pinailler, émettre des mises en garde pour la forme… mais un profond creusement des déficits va être autorisé, non seulement pour offrir des marges de manoeuvre à Donald Trump et son administration, mais également parce que le plafond des 20 000 Mds$ a été pulvérisé depuis longtemps, de multiples façons.
Le plafond repoussé de plus en plus haut
Les excès de déficits sont masqués par de « petits arrangements comptables » qui ne sont que les expédients permettant de travestir la réalité. Une activité qui a pris des proportions industrielles tellement les comptes du pays apparaissent plus maquillés qu’un carré d’as dans la boîte à gants d’une voiture volée.
Chaque année durant les deux mandatures de Barack Obama, la dette fédérale a augmenté entre 1,1 et 1,2 trillion de dollars (millier de milliards), passant officiellement de 10 600 Mds$ à 19 900 Mds$ (et désormais 20 000 Mds$).
J’en profite pour rectifier une objection qui m’est adressée chaque fois que j’évoque la dette publique américaine : mes interlocuteurs s’accrochent à la thèse des 100% qui sont « comme en France, en gros ». J’affirme à chaque fois que c’est plus donc, une bonne fois pour toute, je me réfère à l’estimation du FMI qui donne 107,5% du PIB américain. (Jim Rickards, notre expert américain, dans cet article, arrondi à 105%).
Pour mémoire, début 2008, avant le début de la crise des subprime, elle s’élevait à 60,7% du PIB et venait juste de franchir le seuil d’alerte des 60% considéré par nombre d’économistes comme un ratio au-delà duquel il faut un taux de croissance digne des Trente Glorieuses pour que la dette demeure soutenable. (Vous pouvez commander le dernier numéro d’Intelligence Stratégique sur le sujet : Jim Rickards y explique quelles ont été les stratégies budgétaires des différents politiques de Reagan à Trump, et vous explique les conséquences de ce plafond de la dette pour le mandat de Trump. Vous pouvez en trouver un extrait en cliquant ici).
Mais depuis 2009, à situation exceptionnelle, remède exceptionnel — et surtout, résolution d’un problème de dette astronomique par un ajout de dette intergalactique à l’initiative des banques centrales (via les QE). Si les taux avaient continué de refléter le risque de défaut réel des États et banques émettrices, la pyramide des dettes se serait effondrée dès le premier QE donc les banques centrales se sont empressées d’abolir les mécanismes d’évaluation du marché en se substituant à lui.
Un vieil adage boursier affirme que « c’est l’acheteur qui fait le prix ». Donc les banques centrales se sont transformées en « acheteur en dernier ressort » dès octobre 2009 (leur rôle premier en période de gel des échanges interbancaires). Mais ensuite, elles ont outrepassé leurs attributions en se muant en acheteur no limit puis en « acheteur unique » au prétexte de donner aux gouvernements le temps de réformer le système, de procéder aux ajustements structurels et, pour l’exprimer de façon plus poétique, de transformer les dettes en « poudre de fées ».
Mais à la place, les gouvernements (pratiquement tous les gouvernements de la planète) ont transformé la dette en « poudre aux yeux » grâce à une comptabilité nationale frelatée. Si les créanciers osaient creuser un peu et affronter la vérité, ils cesseraient immédiatement de participer au Ponzi planétaire.
Même avec des taux tout près de zéro (ce qui réduit très artificiellement le coût du service de la dette), cela ne solutionne qu’une partie du problème… l’autre étant que l’expansion de la masse à rembourser finit par dépasser irréversiblement la croissance du PIB. Et dans ce cas, toute hausse du taux d’intérêt (ce qui se profile dès ce mercredi) se surajoute au problème : pendant combien d’années et par quel miracle les États-Unis vont-ils pouvoir continuer de créer 3 000 Mds$ de dettes pour générer péniblement 1 000 Mds$ de PIB ?
Un bon camouflage comptable pour maintenir la supercherie
Mais la réalité est encore plus désastreuse que ne le suggèrent les chiffres officiels. En effet, la subtilité comptable est que le Trésor américain transforme comptablement des emprunts d’État en « investissements » : il en va ainsi des crédits étudiants, qui sortent ainsi du calcul du déficit fédéral ! Easy ! Même traitement comptable pour les dépenses d’infrastructures (autoroutes, réseau ferré, etc.), ou pour les sommes empruntées pour financer la Sécurité sociale, Medicare et Obamacare (il suffit de confondre les dépenses courantes avec les achats de matériel médical). Le même procédé permet de camoufler une longue liste d’autres dépenses à fonds perdus qui se transmutent opportunément en « investissements ».
Et que représentent ces dépenses sociales, ces dépenses de santé non provisionnées, plus la hausse prévisible du service de la dette ?
D’après les derniers calculs, il ne faudra pas attendre 2025 (c’est dans 7 ans, c’est-à-dire la duration moyenne de la dette détenue par les créanciers des États-Unis) pour que le « non provisionné » représente 100% des recettes fiscales et financières du pays.
Tout cet argent aura été absorbé avant même de verser le premier salaire aux fonctionnaires fédéraux, personnels de maintien de l’ordre, agents du renseignement intérieur et extérieur (CIA, NSA, DIA, FBI, etc.), douaniers, militaires, garde nationale, etc.
Mais en réalité, même en relevant le plafond de la dette à 21 000 Mds$, il ne reste d’ores et déjà plus un dollar en caisse pour financer des « grands travaux », le mur de 4 000 kilomètres, la rénovation de l’arsenal nucléaire US, des baisses d’impôts au profit des entreprises, etc.
Alors, la hausse de 0,25 point du taux directeur mercredi sera-t-il le « dernier coup de ciseau »… Celui qui sectionne le dernier brin de confiance dans la soutenabilité de la dette US ?
N’achetez PAS une once d’or… Découvrez l’incroyable recommandation de Simone Wapler… et comment elle pourrait vous permettre de démultiplier la moindre hausse du cours de l’or ! |