Un algorithme, un « algo », par définition, c’est un programme, c’est un automate.
Depuis la Cotation Assistée en Continu (CAC), en 1987, les algorithmes ont pris une importance fondamentale.
Logique : à partir du moment où les valeurs sont cotées en temps réel sur une plage de huit heures ou huit heures et demie, l’algorithme permet d’enchaîner des achats, des ventes à un rythme rapide. Il permet de fractionner et d’exécuter de très gros ordres « au fil de l’eau ».
Mais le véritable motif qui a présidé à leur montée en puissance, c’est qu’à partir de janvier 1988, on a commencé à coter des contrats à terme sur le CAC 40. Donc quand on achetait ou que l’on vendait un contrat, il fallait avoir en face une machine, un automate, qui soit capable d’acheter ou de vendre à la seconde, voire même dans le dixième de seconde, l’équivalent de 40 valeurs. Comme il y avait autant de négociations sur les contrats CAC 40 qu’il pouvait y avoir d’opérateurs, cela nécessitait d’avoir une machine qui arbitre, c’est-à-dire qui vende ou qui achète, autant de fois les 40 valeurs du CAC 40, qu’il y avait de contrat à terme négociés.
Ensuite, sont apparus ce que l’on appelle les ETF (Exchange Traded Funds), c’est-à-dire des paniers de valeurs regroupées selon une thématique ou une stratégie définie. Un ETF peut donc être créé pour répliquer l’évolution d’un ensemble de valeurs minières, de petites capitalisations, ou un ensemble de valeurs industrielles. Des ETF permettant également de répliquer l’évolution de matières premières ont aussi été créés ; ou bien pour répliquer l’évolution d’un secteur, de devises, de titres obligataires, de la dette d’un pays, d’une zone géographique (la Russie, la Chine, le Brésil, l’Europe, etc.) ou même pour répliquer l’évolution d’un indice – dans un sens ou dans l’autre, avec ou sans levier.
Si ces ETF sont extrêmement pratiques pour l’investisseur particulier que nous sommes car ils nous permettent d’investir sur une thématique que nous ne pourrions pas jouer si nous devions acheter des titres vifs (difficile d’acheter des valeurs chinoises sur le marché chinois directement), ils ont pris tellement d’ampleur qu’ils sont devenus le jouet favori des algorithmes.
Ces ETF sont désormais devenus un marché énorme. A tel point que rien qu’en Europe, ils représentent désormais un encours de 620 milliards de dollars fin février 2017 et le marché mondial des ETF atteint désormais 4 000 milliards de dollars !
Alors imaginez que quand un ETF est acheté ou vendu, cela veut dire que 20, 30 ou peut-être même 50 valeurs, selon la largeur du secteur ou la thématique, doivent être achetées ou vendues dans le même temps. Donc l’algorithme, c’est le programme qui exécute des ventes groupées et qui permet les arbitrages entre le cash et le future.
Bien évidemment, les algorithmes, au fur et à mesure, se sont sophistiqués, sont devenus de plus en plus rapides dans l’exécution… et développent à présent eux-mêmes des stratégies : on a fini par les programmer de telle sorte qu’ils recherchent eux-mêmes des gisements de gains ! L’opportunité de gain peut être dans un carnet d’ordres… elle peut être identifiée dans une petite zone de fragilité où des stocks vont se déclencher à la hausse ou à la baisse. Elle peut être dans une différence de cours infime sur une valeur entre une plateforme A, B, C ou D selon que le titre est coté à Francfort, à Londres, aux Etats-Unis, ou sur d’autres plateformes électroniques. Toutes les actions, cotées sur autant de plateformes peuvent avoir au même moment des cours différents de quelques cents et, pour profiter de cet écart de cours, un algorithme va aller vendre les titres là où la demande est la plus avantageuse et racheter là où le titre semble le moins cher.
Sauf qu’au lieu de constituer une exception, qui permettrait juste de réaligner et d’uniformiser le « juste prix » sur les différences places de cotation, rechercher ces petites différences et générer des fluctuations dans les carnets d’ordres sont devenus une sorte de grand jeu électronique entre programmateurs d’algos, chacun cherchant finalement à influencer le cours de façon à créer du mouvement. Car qui dit du mouvement, dit écarts, et les écarts c’est du profit, et les exécutions multiples, ce sont des commissions de courtage.
Donc aujourd’hui, l’algorithme est devenu le pilier, le moteur de la transaction boursière, l’essence des marchés. Et on a complètement perdu de vue la recherche du cours d’équilibre, la recherche de la valeur avec tout ce que cela peut constituer de subjectivité. L’algorithme est au contraire programmé pour générer le maximum de prix différents, chaque prix obtenu correspondant évidemment à une transaction qui est facturée… et qui génère donc du courtage.
Mais le pire, c’est que depuis 30 ans maintenant que j’observe les marchés, je peux aussi dire que j’assiste à la « mort » du marché. Car oui, les algorithmes, ces prouesses technologiques censées soulager l’opérateur boursier, sont tout simplement en train de tuer le marché – qui est théoriquement je le rappelle, le lieu de la confrontation entre l’offre, et la demande, de laquelle est censée naître le juste prix. Nous en sommes loin, et nous verrons demain comment cette situation est possible.
Pour lire plus d’analyses sur les algorithmes.
Pour lire plus d’analyses sur la manière dont les banques centrales tiennent les marchés.
2 commentaires
ETF: est-ce vérifié sur les ETF physiques comme sur les synthétiques ?
C’est pas ca un algo,avec tout le respect que je vous dois.
Ca c’est un chatboot ou boot.
Un algo ca opere sur une base de données ou data et repond a une ou des equations via ar exemple le solveur excel.Mais c’est vrai que l’on associe toujours a un algo un boot.