L’allocution de Recep Tayyip Erdogan devant le parlement turc était très attendue (elle a été retransmise par des dizaines de médias occidentaux) car il avait promis de tout révéler sur l’affaire Khashoggi.
De quoi embarrasser fortement l’Arabie saoudite si la divulgation d’éléments nouveaux impliquaient directement le prince héritier Ben Salmane, « MBS ».
MBS passé sous silence
Mais il n’y a eu aucune « révélation », à part l’évocation de la disparition de caméras de surveillance à l’intérieur du consulat d’Arabie à Istanbul.
De façon certainement très « diplomatique », le président turc a évoqué à plusieurs reprises ses nombreux entretiens depuis trois semaines au sujet de l’affaire avec le roi Salmane… mais pas un mot sur « MBS » (son nom n’a même pas été prononcé).
Pas d’allusion ni aux enregistrements au sein du consulat saoudien ni aux conversations téléphoniques potentiellement interceptées (des rumeurs provenant du renseignement turc ont « fuité » dans la presse) entre le commando des exécuteurs du journaliste et le prince héritier… au sujet desquelles la diplomatie saoudienne prétend « [ne pas être] au courant ».
Erdogan aurait pu faire s’effondrer ce matin la version officielle destinée à sauver l’image de « MBS ».
Le Davos du désert en (relatif) petit comité
Il ne l’a donc pas fait et ménage ainsi son grand rival régional… au nom « d’intérêts supérieurs », sans aucun doute !
Dans le même temps, le ministre saoudien de l’Énergie Khaled al-Faleh, interviewé en marge de la cérémonie d’ouverture du forum international sur l’investissement de Ryad, reconnaît que « ce sont des jours difficiles. Nous traversons une crise, le meurtre de M. Khashoggi est abominable et personne dans le royaume ne peut le justifier ».
Et nous découvrons que Steven Mnuchin, le secrétaire américain au Trésor, qui avait déclaré boycotter le « Davos du désert », a été reçu lundi par le prince héritier « MBS ».
Alors que la plupart des « sherpas » de la planète et des patrons de grandes multinationales ont annulé leur participation à l’événement, le patron de Total, Patrick Pouyanné, a maintenu la sienne en justifiant : « C’est dans ces moments-là que vous renforcez vraiment le partenariat » (ce qui lui a valu les éloges du ministre Khaled al-Faleh, justement en charge du pétrole).
Des compagnies pétrolières russes et chinoises ont également maintenu le forum de Ryad dans leur agenda… cela s’appelle de la « realpolitik » (je ne connais pas le terme en chinois, mais ce concept constitue la base même de la politique étrangère de Pékin).
Les trois principales raisons de la grande crise qui se profile