Cher lecteur, connaissez-vous Faust ? Non pas le héros d’un conte populaire allemand, mais Jon Faust.
Parfois, les nouvelles les plus importantes sont tellement enfouies que ce ne sont même pas des nouvelles. Une histoire spécifique a beau représenter un événement de marché essentiel entre tous, si personne ne la remarque et n’en comprend la signification, elle ne peut pas vraiment être considérée comme une nouvelle.
Or, il s’est passé quelque chose de semblable, il y a une dizaine de jours. L’information financière la plus importante, selon moi, depuis un bon moment, est passée totalement inaperçue. En partant du principe que vous ne l’avez trouvée nulle part, vous pourrez la découvrir ici :
Source : Center for Financial Economics
▶ Qui est Jon Faust ?
A présent, votre première réaction est probablement la suivante : « Mais qui est Jon Faust, et en quoi le fait qu’il conseille la Fed devrait-il nous préoccuper ? »
Réponse : Faust est un initié par excellence, au sein de la Fed. Il s’agit de l’expert monétaire le plus puissant. Le fait de connaître son parcours est essentiel. Notamment pour savoir de quoi sera faite la politique de la Fed, à l’avenir.
Faust est un économiste spécialiste des questions monétaires. Il est titulaire d’un doctorat obtenu à Berkeley, université de Californie, où Janet Yellen a enseigné pendant de nombreuses années. Et le directeur de thèse de Faust ne fut autre que le mari de Janet Yellen, le prix Nobel George Akerlof. Peu d’économistes sont aussi proches de Yellen que Faust. La même chose est vraie pour Bernanke, qui respecte énormément Jon Faust.
▶ Jon Faust : son parcours
De 1981 à 2006, Faust a travaillé comme économiste au Conseil de la Réserve fédérale, à Washington (DC), avant d’accéder au poste de directeur adjoint de la Division Finance internationale. Puis, en 2006, Faust a quitté la Fed pour devenir directeur du Center for Financial Economics (CFE), à l’université John Hopkins.
J’ai été l’un des premiers bienfaiteurs du CFE. Ainsi, en tant que tel, j’ai participé avec d’autres au recrutement de Jon, qui a quitté la Fed pour nous rejoindre. Dans le chapitre 6 de mon livre, En Marche vers la Faillite, je parle longuement des entretiens et échanges que j’ai eus avec Jon.
Au cours de l’été 2012, Faust a été nommé « conseiller spécial » auprès du Conseil de la Réserve fédérale, à la demande de Ben Bernanke, alors président de l’institution. Il a conservé cette fonction jusqu’en août 2014. Cela couvre la période de transition entre le départ de Bernanke et l’arrivée de la nouvelle présidente, Janet Yellen, en janvier 2014.
Au cours de son mandat à la Fed, de janvier 2012 à août 2014, Faust a notamment vécu des moments cruciaux. Notamment le lancement du QE3 ou encore la mise en oeuvre du « Taper » de 2013 à 2014. Sans oublier la préparation du relèvement des taux d’intérêt (liftoff) qui a fini par avoir lieu en 2015, peu de temps après le départ de Faust.
▶ Le rôle de Jon Faust : gérer les attentes du marché
La tâche principale de Faust, à la demande de Bernanke, puis de Yellen, était de communiquer autour de la politique monétaire. Il ne s’agissait pas d’une communication de type relations publiques ou relations presse, au sens traditionnel du terme. Non, son but est de communiquer autour de la politique monétaire afin de gérer les attentes du marché.
Bernanke voulait une politique « sans surprise », à la Fed. Selon les cas, il assouplissait la politique monétaire, comme il l’a fait avec le QE3. Ou bien il la resserrait, comme il l’a fait avec le « Taper ». Mais dans les deux cas, Bernanke voulait signaler tout changement de politique très à l’avance. Il voulait évaluer la réaction des marchés, gérer leurs attentes. Et, par-dessus tout, éviter les chocs et les surprises.
Bernanke s’est appuyé sur Faust pour gérer les attentes de marché (certains diraient les « manipuler »), via différents vecteurs de communication, notamment :
- les déclarations de la Fed ;
- les discours prononcés par ses gouverneurs ;
- les questions préparées à l’avance lors des conférences de presse ;
- les fuites dirigées vers certains journalistes privilégiés (tels que Jon Hilsenrath, du Wall Street Journal) ;
- des mots ciselés tels que « patience » (pour décrire la future politique de relèvement des taux).
Et le tout sous l’étendard du forward guidance.
▶ Jon Faust a participé à la création de la politique monétaire
Pour mener à bien ses missions de communication, Faust a participé étroitement à la création de la politique monétaire elle-même. En effet, Bernanke me l’a personnellement confirmé à Séoul lorsque je lui ai parlé du rôle de Faust.
Bernanke et moi avons plaisanté sur le fait que la Fed avait débauché Faust du CFE, après que j’ai contribué moi-même à le débaucher de la Fed. Bernanke a ri et déclaré : « Oui, mais nous vous l’avons rendu ». C’est vrai. En septembre 2014, Jon est retourné au CFE pour reprendre ses fonctions de directeur du centre.
Puis, à la mi-février, comme je l’ai indiqué plus haut, Faust a de nouveau été débauché par le nouveau président de la Fed, Jerome Powell, pour retourner à Washington et devenir son conseiller.
On ne peut qu’insister sur l’importance de cette annonce, en termes de politique monétaire. En effet, Powell n’est pas un économiste, il est avocat de formation. Cela signifie qu’il sera encore plus dépendant des conseils de Faust que Bernanke ou Yellen. Rappelons que ce sont deux économistes figurant parmi les plus éminents du monde.
▶ Jon Faust : la continuité des politiques de Bernanke et Yellen
Plus important encore, le retour de Jon Faust signifie la continuité des politiques menées par Bernanke et Yellen. Cela signifie un resserrement « progressif » de la politique monétaire. Cela se matérialisera par des hausses de 0,25% tous les mois de mars, juin, septembre et décembre jusqu’au début des années 2020. Sauf si plusieurs facteurs forcent la Fed à marquer une « pause ». Ces facteurs de pause seraient la perte d’emplois, la désinflation ou des baisses de marché chaotiques.
Ce scénario de base comporte de nombreuses conséquences et éléments annexes. Notamment, le rôle des « dots » [NDR : prévisions] dans les décisions de la Fed, le rôle des présidents des Réserves fédérales régionales dans l’élaboration des politiques. Ou encore la nécessité de dégonfler les bulles d’actifs, et à quel niveau/moment exercer le « Put de la Fed » en cas d’effondrement de marché.
Jon Faust a également contribué à la création et à la mise en oeuvre de ces règles, exceptions et mesures annexes. Il me les a toutes expliquées lors d’entretiens privés, au fil des ans. Les conseils de Jon ont complété d’autres informations tirées de mes entretiens avec des gouverneurs, présidents, vice-présidents, économistes de la Fed et présidents de réserves régionales.
La bonne nouvelle, c’est que les modèles très affinés que nous avons élaborés depuis 2013 pour prévoir les politiques de la Fed, resteront valables à court terme.
Le retour de Jon Faust à la Fed nous le garantit.
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