Les places boursières européennes alignaient, jusqu’à hier, 9 séances de hausse sur une série de 10… cela relève de la simple anecdote. Vous êtes désormais blasé. Ce genre de séquences d’obnubilation haussière se multiplie depuis l’été 2009 – ou le printemps 2010.
L’exceptionnel se banalise, l’incongru devient le lot quotidien, l’absurdité des mouvements boursiers traduirait simplement une forme de logique plus subtile, compréhensible des seuls initiés.
Nous pourrions noircir une page de justifications de la hausse, oscillant entre mauvaise foi, langue de bois et élucubrations grotesques… alors que la seule évidence qui saute aux yeux, c’est la volonté de mener les cours là où les arbitrages seront les plus juteux.
Et comme de beaux exemples valent mieux que de longs discours, nous en avons sélectionné deux qui concernent des valeurs appartenant à des secteurs aussi éloignés que possible : le luxe (frivolité, vanité et coups marketing) et les médicaments (nécessité, rigueur, investissements de longue haleine).
Oui, des titres que tout oppose d’ordinaire voient leur cours évoluer de manière totalement identique, grimper inexorablement sans jamais consolider 48H d’affilée. Sans même jamais reperdre plus de 1,5% au pire d’un mouvement correctif imprévu. Et ce, même si les cours avaient grimpé de 8 à 10% sans reprendre leur souffle ! Et pourtant, tout les oppose. Voyez plutôt.
◊ PPR – ou l’escalier mécanique de la hausse
Dissipons tout de suite toute ambiguïté : nous ne contestons nullement qu’il y ait de bonnes raisons de voir ce titre progresser de façon sympathique. Nous aimons bien François-Henri Pinault, nous jugeons que le management du groupe est de grande qualité (cela a toujours été le cas), la stratégie de virage vers le luxe (Gucci, Boucheron…) et le sportswear haut de gamme se défend parfaitement.
Nous savons que le marché apprécie le désengagement du secteur de la distribution (la FNAC et La Redoute sont en cours de cession après le vaisseau amiral « Le Printemps » vendu aux Italiens) et la politique d’acquisitions ciblées (la dernière en date, de taille fort modeste, concerne Volcom).
Oui, nous connaissons bien les « plus » qui motivent les acheteurs mais nous restons perplexe face à la hausse inexorable du titre qui évolue en parfaite symétrie inverse par rapport au dollar.
C’est une grande première puisque chacun connaît l’impact négatif de la chute du billet vert (-10% en deux mois) sur le chiffre d’affaires : tout se passe comme si l’euro avait chuté d’autant dans l’intervalle.
◊ SANOFI-AVENTIS : une hausse incompréhensible
SANOFI devient une nébuleuse de laboratoires et de « génériqueurs ». Si, de cette manière, le groupe tisse sa toile sur l’ensemble de la planète, il accroît d’autant son exposition à la désintégration du dollar. Mauvais point.
En plus, l’annonce du déremboursement d’une nouvelle liste de médicaments qui perdent soudain leur « efficacité » par décret ministériel n’est pas non plus une information favorable, d’autant que Medicare est également menacé aux Etats-Unis par les Républicains et le « Tea Party ».
◊PPR/SANOFI : deux titres sur le même escalier mécanique de hausse (… ou de hausse mécanique)
Voyons cela de plus près : PPR vient d’effectuer un second test de 122 euros (au lendemain de son record des 122,55 euros) et n’est plus très loin de parvenir à retracer son zénith des 128,3 euros du 13 décembre 2010.
Le canal ascendant est d’une surprenante régularité depuis le plancher des 100 euros du 17 mars et il n’y a eu qu’une seule séance de consolidation : le 18 avril avec un repli de -1,4%… effacé dès le lendemain. Et finalement hier, jeudi, alors que je suis en train de rédiger ces lignes. Mais on ne dénombre pas plus de 5 séances de repli supérieures à 0,3% sur une série de 33 (pour un gain global de +21%).
Plus fort encore, PPR a amélioré 29 fois sur 33 son meilleur score de la veille, y compris quand le titre a terminé « dans le rouge ».
En ce qui concerne SANOFI-AVENTIS, le parcours des 7 dernières semaines est tout aussi éblouissant et tout aussi singulier avec un gain de 20% entre 46 et 54,7 euros.
« L’escalier mécanique de hausse » n’a connu qu’une seule hésitation (un repli de -2% comme toutes les autres valeurs de la cote) le 18 avril dernier avec la mise sous surveillance négative de la dette américaine par Standard & Poor’s – et encore une fois, jeudi, alors que je termine ce papier.
Cela va vous surprendre, mais dans un cas comme dans l’autre, c’est la moyenne mobile à 8 jours qui a fait office de support technique. Si elle venait à être enfoncée, cela signifierait que les algorithmes sont désactivés et que le soutien des cours ne constitue plus une priorité.
Si la correction s’enclenche, nous pronostiquons l’effacement de 50% du terrain gagné depuis Fukushima, soit un repli d’au minimum 10%… mais nous parierons volontiers sur phase baissière tout aussi irréversible que la hausse et la disparition de 90% des gains accumulés en contradiction complète par rapport au cours du dollar.