Lorsque l’on évalue un marché et que l’on cherche à déterminer une tendance pour les mois à venir, il faut se demander quels sont les catalyseurs qui seront à l’oeuvre.
Jusqu’à présent, le crédit quasiment gratuit en Europe portait les marchés à la hausse. Le Quantitative Easing servait d’alibi à l’envolée boursière : « il y a tellement d’argent, il faut bien qu’il aille quelque part ! ». C’était l’euphorie.
Mais, depuis quelques semaines, c’est un peu plus compliqué : les investisseurs essayent de trouver de nouvelles raisons pour justifier la hausse des indices. Car finalement, pourquoi acheter un CAC 40 à 5 000 points, qui a consolidé depuis les 5 200, alors que tous les catalyseurs sont désormais intégrés dans les cours et que les fondamentaux restent poussifs ? Le QE donc, la baisse de l’euro, la baisse du pétrole sont à présent « pricés » et l’on s’habitue même au psychodrame grec.
Du côté des « bonnes nouvelles » (enfin, des motifs de hausse des marchés), on a finalement eu de bonnes surprises avec les résultats des entreprises américaines : elles ont publié des résultats moins mauvais que prévu en dépit de l’appréciation du dollar. Les bénéfices sont en recul de 1% contre, rappelez-vous, une baisse de 3 à 5% attendue. En même temps, les sociétés avaient volontairement préparé le marché à de mauvais résultats, afin de ne pas créer de mauvaises surprises. Mais la conséquence de ces bénéfices moindres et d’un dollar fort, c’est que les entreprises vont réduire leurs coûts cette année ; il faut s’attendre donc à ce que ces réductions se fassent dans les effectifs et dans les dépenses marketing.
Par exemple, Procter and Gamble va réduire de 500 M$ ses dépenses marketing cette année. Même schémas qu’en 2009 / 2010 et suivant, où les entreprises avaient finalement publié des données correctes après avoir réduit leurs dépenses. Mais cette situation ne peut être que temporaire : le « cost killing », comme on dit dans le milieu, connaît ses limites et l’amélioration des profits doit passer par une hausse de l’activité.
Un autre catalyseur devrait également animer les marchés : les méga-fusions et opérations financières.
Dernièrement, FedEx a jeté son dévolu sur l’européen TNT Express pour 4,4 Mds$ : il le rachète avec une prime de 33%. Toujours aux États-Unis, Informatica, un spécialiste des services d’intégration de données, se fait racheter par deux fonds pour 5,3 Mds$ et avec une prime de 10% (prime faible, mais l’action était déjà bien valorisée). Royal Dutch Shell fait une offre sur son rival BG Group pour la bagatelle de 64 Mds$.
En France, Alcatel-Lucent (Fr0000130007) va fusionner avec Nokia… et puis, évidemment, vous avez entendu parler de la méga opération de Cap Gemini sur l’Américain Igate (dans les services informatiques) ou, dans le secteur du transport / logistique, encore le rachat de Norbert Dentressangle (FR0000052870) par l’Américain XPO Logistic pour 3,24 Mds€ et au cours de 217,50 € par action… ce qui fait une prime de 37% par rapport à son dernier cours coté !
Dans le secteur de la Pharma et des biotechs le géant des génériques Mylan a fait une offre sur Perrigo pour 29 Mds$… et Synageva vient de se faire racheter par Alexion, pour plus du double de sa capitalisation boursière ! Regardez ce que mon collègue spécialiste des biotechs, Ray Blanco, expliquait à ses lecteurs sur le sujet :
« Alexion est prêt à mettre 8,4 Mds$, soit plus du double de la valorisation actuelle de Synageva. Le groupe a offert 230 $ par titre (une partie en cash, l’autre en action) et GEVA s’est donc envolé de plus de 124% après clôture. Depuis, le titre reste évidemment bien ancré à ce niveau.
Je pense que ce rachat qui valorise à plus du double Synageva clouera le bec à tous ceux qui disent que les bitoechs sont dans une bulle. Il y a énormément de valeur qui est créée en permanence sur ce secteur. Ce sont ceux qui ne comprennent rien au secteur qui y voit une bulle. »
J’avoue faire partie de ces ignares, et laisse donc à Ray le soin de vous guider sur les biotechs (plus d’infos ici).
Tout cela a donc de quoi redonner un souffle au marché, à condition que les opérations soient mûrement réfléchies : à terme, le but est de créer des dynamiques d’ensemble, des synergies, de réduire les coûts, de gagner des parts de marchés et/ou des points de marge, bref : d’être plus solide.
Or, attention à l’effet « boomerang ». En Bourse, l’opération 1+1 est rarement égale à 2 car les synergies sont non seulement difficiles à mettre en place mais il faut du temps pour qu’elles produisent des effets positifs.
Mais pour l’heure, réjouissons-nous, cela crée de belles opportunités donc vous pouvez profiter. Cependant, attention : ces opérations financières, aussi belles soient elles, ne contrebalanceront pas seules un retournement de tendance. Restez prudents, et couvrez vos portefeuilles.