Les journées se suivent et ne se ressemblent pas pour les grands acteurs du transport aérien. Alors que l’action Lufthansa (DE0008232125-LHA), comme un symbole de l’essoufflement de l’économie allemande, décrochait d’environ 6% hier en raison notamment d’une érosion de 25% du bénéfice d’exploitation sur la période avril-juin, le bénéfice net ayant quant à lui chuté de 70% (à cause, entre autres, d’une provision fiscale de l’ordre de 200 M€), le titre Air France-KLM (FR0000031122-AF) engrange pour sa part près de 9% ce mercredi vers 15h40.
Le transporteur franco-néerlandais signe ce faisant la meilleure performance du SBF120, au sein d’un marché parisien atone dans l’attente de l’issue de la réunion de la FED. Cotant désormais autour de 9,45 €, il ramène sa perte à moins de 0,5% depuis le début de l’année et affiche une hausse de près de 21% sur un an.
Les investisseurs saluent des comptes du deuxième trimestre marqués par une croissance de 15,6% du bénéfice d’exploitation à environ 400 M€. Une progression significative donc, mais qu’il convient tout de même de relativiser, car due à une base de comparaison favorable, la période avril-juin 2018 ayant été marquée par une série de grèves dont l’impact avait atteint 260 M€. Or, en excluant celui-ci, le bénéfice d’exploitation afficherait un recul de 33%.
Le chiffre d’affaires a quant à lui progressé de 5,1% pour s’établir à 27,8 Mds€, d’où une marge d’exploitation en augmentation de 50 points de base à 5,7%. Les prévisions annuelles ont au surplus été confirmées, par-delà un contexte éminemment concurrentiel (déploré d’ailleurs par la direction de Lufthansa, qui s’est en particulier émue de la poussée de Ryanair et Easyjet sur les lignes courtes). De fait, Air France-KLM aspire toujours à une réduction de 1% ou à tout le moins à une stabilité des coûts à changes et carburant constants, ainsi qu’à un ratio dette nette/Ebitda inférieur à 1,5.
L’A380 cessera de voler d’ici 2022
Dans un registre plus symbolique (bien que, du strict point de vue financier, cette mesure se traduira par des dépréciations d’actifs de l’ordre de 400 M€), le groupe a également annoncé, suprême crève-cœur pour les férus d’aéronautique, le retrait des dix Airbus A380 qu’exploite Air France d’ici 2022. Une décision stratégique attendue, l’époque étant à l’essor exclusif des bimoteurs, et motivée par la volonté de la direction de « simplifier et d’harmoniser la flotte, mais aussi d’améliorer la compétitivité avec des avions plus modernes, plus performants, et dont l’empreinte environnementale est largement réduite ».
« L’environnement de compétition actuel limite les marchés sur lesquels l’A380 peut être exploité de façon rentable », a renchéri le PDG Benjamin Smith, reprenant à son compte les arguments brandis en février dernier par Airbus Group pour justifier l’arrêt de la production de celui qui n’est jamais parvenu à reprendre le flambeau du Boeing 747, la faute à une consommation de kérosène par siège de 20 à 25% supérieure à celle des appareils long-courriers de nouvelle génération.
Tenu à bout de bras par Emirates, l’Airbus A380, aussi majestueux soit-il, n’aura jamais suscité l’engouement mondial espéré.
Pleins feux sur l’A220 et sur Transavia
Tel ne devrait pas être le cas de l’Airbus A220, qui correspond à l’ancien CSeries du groupe canadien Bombardier, un programme dont l’avionneur européen a pris le contrôle il y a deux ans et auquel Air France-KLM croit manifestement dur comme fer.
Le groupe a en effet passé commande de 60 exemplaires de ces appareils fabriqués au Canada, la patrie de Benjamin Smith, selon lequel l’A220 participe de la volonté d’Air France-KLM « d’inscrire (son) activité dans une dynamique durable, en réduisant significativement nos émissions de CO2 et nos émissions sonores ».
D’un montant de 5,5 Mds$ à prix catalogue, cette commande ferme, assortie d’une option sur 30 avions supplémentaires ainsi que 30 droits d’acquisition (des options sans date d’achat), constitue une étape majeure dans le rajeunissement de la flotte du transporteur, qui exploite actuellement 541 appareils pour ses trois principales marques Air France, KLM et la low cost Transavia.
Cette dernière vient par ailleurs d’obtenir le feu vert des pilotes du SNPL (Syndicat national des pilotes de ligne) d’Air France pour son développement sans limitation du nombre d’avions « et dans des conditions économiquement équilibrées pour le groupe Air France ». Un agrément précieux pour continuer d’exister, voire mieux, au départ du hub (NDLR : base principale) d’Orly et d’aéroports de province, dans l’univers impitoyable des compagnies à bas coûts.
L’avenir d’Air France-KLM passe aussi par là. Sans l’ombre d’un doute.
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