Sale temps pour Air France-KLM (FR0000031122-AF), dont l’action reculait d’environ 3,6% vers 10h40 ce vendredi en raison de comptes dégradés au titre du premier trimestre.
Les investisseurs voient rouge après l’annonce d’un quasi-triplement de la perte opérationnelle, ressortie à 303 M€, à comparer à un déficit de 118 M€. La perte nette du transporteur franco-néerlandais a au surplus crû de 19% pour s’établir à 320 M€, alors même que le premier trimestre de l’exercice écoulé avait pâti d’un long mouvement de grèves.
Une fois de plus, c’est la compagnie aérienne française, plombée par un effet devises défavorable et surtout une augmentation substantielle de la facture de kérosène (+140 M€), qui fait figure de mauvais élève, son homologue batave ayant pour sa part ramené sa perte d’exploitation à 56 M€, contre une précédente perte de 116 M€. A contrario, celle d’Air France s’est littéralement envolée, passant de 78 à 256 M€.
Un patron sous pression
De quoi anticiper d’âpres négociations entre Paris et Amsterdam, alors que l’Etat néerlandais, bien décidé à rebattre les cartes, avait pris tout le monde de cours fin février en montant au capital pour porter sa participation à 12,68%. Avec sans doute l’objectif de se hisser au niveau de celle de l’Etat français, actuellement de l’ordre de 14%. « Dans ce contexte, un renversement des alliances avec au bout du compte une prise de contrôle de KLM, aidée par China Eastern Airlines et Delta Airlines, ne peut être exclu », expliquait mon confrère Eric Lewin dans ces colonnes il y a quelques semaines.
Nous n’en sommes pas encore là, mais les chiffres plaident indéniablement en faveur des autorités néerlandaises, qui aspirent selon toute vraisemblance à garantir à KLM le maintien d’une large autonomie et le contrôle de son développement sur la plate-forme Amsterdam-Schiphol, décode Bruno Trévidic dans Les Echos. A contrario, le nouveau patron Benjamin Smith, qui entretient des rapports tendus avec Pieter Elbers, président du directoire de KLM, factieux auquel il n’aurait pas serré la main lors de leur seule conférence de presse commune, mais qui peut néanmoins compter sur l’indéfectible soutien de ses salariés, plaide pour une stratégie d’intégration loin de faire l’unanimité.
A plus court terme, le creusement des pertes d’Air France laisse également craindre des suppressions d’emplois et de lignes, le retour à la rentabilité étant d’autant plus essentiel que KLM s’impatiente. D’abord prévu pour cet été, le prochain plan stratégique sera finalement dévoilé en novembre.
Bien des choses pourraient changer d’ici six mois et Benjamin Smith le sait : il marche sur des œufs.