“Quote Stuffing”, “Spoofing”, “Layering”, “Front Running” ?!
Ces noms vous sont-ils familiers ?
Eh bien ils devraient : ils font partie de votre cercle d’ennemis les plus intimes si vous intervenez de façon active sur les marchés Financiers.
Ennemis intimes, oui : ils surveillent à chaque instant ce que vous faites, regardent par-dessus votre épaule, votre carnet d’ordres, vos passages d’ordre, vos types d’ordres, les quantités… Ils veillent à bien comprendre et intégrer vos stratégies… pour vous faire le croche-patte parfait dans l’escalier pourvu que le gadin vous sonnera assez — et vous faire les poches le temps que vous repreniez vos esprits.
Bon des ennemis aussi intimes, je vous l’accorde, on s’en passerait bien. Mais il faut faire avec si l’on veut trader, car il est impossible de s’en débarrasser. Parce que « Quote Stuffing », « Spoofing », « Layering » et « Front Running » ne sont pas des noms de gangs New Yorkais (quoi que…) mais les noms de quelques catégories d’algorithmes de trading à haute fréquence (H.T.F) qui n’ont qu’un seul objectif : vous faire les poches.
Alors, comme le dit Sun Tzu, n’est-ce pas, dans l’Art de la Guerre (à lire tous les matins avant d’allumer vos écrans) :
Qui connaît son ennemi comme il se connaît,
en cent combats ne sera point défait.
C’est parti. Je vais disséquer pour vous les principaux algos qui sévissent sur les marchés, et vous monter comment les repérer et… eh bien, les éviter.
Algorithme, montre ta face !
Un algorithme, c’est un programme informatique développé par des petits génies des mathématiques (les quant) et qui a été développé pour gagner de l’argent / donc en faire perdre aux autres. Ils sévissent en permanence sur les marchés, réagissent la nanoseconde et, évidemment, quand ils interviennent, plument tout ce qui passe sous leur radar.
Le phénomène a pris énormément d’ampleur depuis la crise de 2008 (alors même que l’on voulait assagir les marché) ; maintenant ils sont tout simplement PARTOUT. Selon différentes estimations, ils représentent au moins 70 à 80% des transactions aux Etats-Unis. Cela veut dire que ce ne sont pas des êtres humains qui animent une séance de bourse, mais bien des programmes mathématiques. Sans doute un peu moins en Europe, mais comme les marchés européens suivent les réactions des marchés Américains… cela revient sans doute au même. Effet collatéral.
Le problème que nous avons avec les algos, c’est qu’ils faussent et truquent en permanence les marchés. Ils envoient de faux signaux, et… vous (vous mais aussi les algos et les professionnels adverses) tombez dedans. Vous me direz que ceci devrait être interdit.
Je vous rassure : ça l’est. Aux Etats-Unis, les « manipulations de marché » sont interdites. Nous parlons bien de manipulations de marchés là car pour tendre son piège, un algos balance en permanence tellement de faux ordres à la nanoseconde (afin de déstabiliser les carnets d’ordre et manipuler les prix).
Je ne crois pas qu’il se passe une seule semaine sans qu’un HFT (High-frequency trading) se fasse prendre la main dans le sac. Mais les moyens sont bien faibles face au lobby financier (grosses banques en face qui créent ces algos…) et face aux milliards d’opérations qui sont en permanence actives sur les marchés. Car à ces vitesses et avec le nombre d’ordres envoyés dont nous parlons, il est pratiquement impossible d’analyser qui fait quoi. Donc le monde financier semble en avoir pris son parti… et, blasé par cette escroquerie, ne réagit même plus vraiment.
La conséquence visible ?
Vous entendez, sur votre chaine économique préférée, une flopée de commentateurs et d’analystes de marchés en train de ramer pour trouver une explication fondamentale, audible et raisonnable aux variations du pétrole qui fait -6% un jour, +7% le lendemain, -5% le jours suivant etc.
Ah ! Je-me-marre ! Les acheteurs ou vendeurs humains sur le marché du pétrole ne changent évidemment pas d’avis aussi rapidement ni brutalement sans qu’aucune nouvelle fondamentale ne vienne changer la donne.
Bref.
S’il est impossible de suivre les agissements des algos vu leurs vitesse d’exécution, il est pourtant possible de suivre leurs traces et d’en tirer profit au niveau trading. Par « suivre leurs traces », je veux dire que, par exemple, vos yeux seraient incapables de voir un hors-bord passer devant vous s’il taille la mer à la vitesse de la lumière. Mais vous pourrez voir son sillage, les traces d’écume bouillonnante qu’il laisse derrière lui seront sa signature.
Donc avec les algos sur les marchés financiers, c’est la même chose.
Je vais m’arrêter là pour aujourd’hui, j’ai déjà été long, et demain, je vous montrerai en exemple deux traces laissées par des algos : sur le CAC40 et sur Nexans.
Et si cela vous intéresse, je pourrai vous expliquer par la suite comment et pour quelles stratégies bien particulières nos amis Quote Stuffing, Spoofing, Layering et Front Running et autres HFT ont été programmés.
Allez, à demain.
Et d’ici là, surveillez vos arrières !
Gilles