Loin de l’euphorie américaine après l’élection de Trump, les marchés européens restent prudents. Et pour cause ! Les nuages s’accumulent dans le ciel de l’Europe et les tensions politiques s’aggravent.
Regardez ce comparatif entre le SP5 00, le Stoxx 50 et l’indice Italien (le MIB). Si l’Europe en général est à la traine, l’Italie, en rouge, est largement distancée…
Et pour ce faire, je dois mettre mon costume d’analyste politique car rarement les marchés n’auront été autant liés à des scrutins aussi rapprochés.
France, mais surtout Italie et Autriche : un contexte politique tendu
« L’élite » politique est de plus en plus désavouée, quel que soit son camp. Le peuple veut du nouveau et surtout amorce un repli sur l’identité nationale qui a de quoi inquiéter les institutions européennes.
En France, François Fillon symbolise en grande partie ce mouvement. Discret, il illustre à lui seul à la fois le ras-le-bol des « hommes d’Etat » qui l’ont précédé (on oublie un peu vite qu’il cumule 35 ans de mandat… !) et surtout, on voit pointer le désir de souverainisme d’une tranche de la population.
Dans le camp d’en face c’est la même chose. Si la droite vire à droite, la gauche, elle, semble prête aussi à se durcir ! Mélenchon & Co s’en frottent les mains et snobent sans bouder leur plaisir une primaire du parti socialiste qui en devient pathétique.
Du coup, la menace d’un contexte hyper clivant et d’une tension extrême dans le pays gronde.
Et si je prends le temps de vous parler du cas français, c’est bien que cette tendance est générale et nous avons deux évènements d’importance dès ce week-end qui pourraient mettre le feu aux poudres dans la cabane Europe déjà bien fragile : les élections autrichiennes et le référendum italien.
Autriche : Le FPÖ pourrait prendre le pouvoir
En Autriche, l’élection de ce week-end pourrait voir Norbert Hofer, leader du parti d’extrême droite FPÖ, prendre la présidence. Encore une fois, rejet de la classe politique en place, rejet de l’Europe sont les principaux catalyseurs de cette ascension fulgurante du « jeune » homme politique de 45 ans. Son adversaire en a 72 et va avoir du mal à incarner le renouveau.
Le dernier débat a occasionné des échanges houleux et de nombreux intellectuels appellent à rejeter l’extrême droite. A se demander si ces « intellectuels » prennent conscience de l’effet inverse que produit ce genre de consignes de vote, rabaissant les électeurs à leur statut de cancre de la classe, de « moins bien pensants »… Je ne comprendrais jamais.
Mais passons car LA véritable angoisse est du côté de l’Italie !
Référendum italien : Les populistes en embuscade !
Le dernier point de cristallisation de la sphère économique est, encore une fois, lié à la politique avec le référendum Italien appelé par Renzi.
La proposition du gouvernement est tout simplement la plus vaste proposition de réforme constitutionnelle depuis la fin de la monarchie il y a 70 ans. Elle consiste à réduire le nombre de sénateurs de 315 à 100 et à modifier l’équilibre entre les chambres du Parlement : réduire le pouvoir du Sénat et augmenter celle du gouvernement.
Le Premier Ministre n’a pour soutien que le parti de gauche et certains centristes. Pendant ce temps, les « cinq étoiles », dirigées par le comédien Beppe Grillo, Forza Italia (parti de Berlusconi), le parti de l’extrême-droite, la Ligue du Nord, et les partis communistes font campagne pour que la proposition soit rejetée.
Les craintes du marché ne sont pas vraiment liées au contenu de la réforme, mais un vote du « NON » pourrait ramener l’Italie à une élection anticipée puisque Renzi a déclaré qu’il démissionnera si la proposition était rejetée.
Du coup, la question constitutionnelle s’est vite transformée en véritable vote de confiance ou de défiance à l’égard du gouvernement.
Mais surtout c’est la montée du mouvement 5 étoiles qui a déjà ravi la mairie de Rome et qui prône un référendum sur le maintien du pays en zone euro qui effraie les marchés. Un effet boule de neige qui pourrait trouver son point de départ dès dimanche 4 décembre si le non l’emporte. Après le Brexit, l’Italexit pourrait devenir la prochaine menace sur les places financières et pour la solidité de l’Europe tout entière.
Et c’est bien sur ce point-là que les marchés ont commencé à s’inquiéter. La meilleure preuve reste la forte remontée du spread entre les taux italiens et allemands à 10 ans.
Passé de moins de 120 points en septembre à 185 cette semaine, il illustre la peur de voir une nouvelle élection se profiler.
La volatilité devrait assez nettement augmenter dans les prochains jours…