De plus en plus isolée sur la scène internationale en raison de l’épidémie de coronavirus, la Chine risque fort de voir son économie sérieusement en pâtir. Certains secteurs sont aujourd’hui particulièrement touchés, au premier rang desquels le luxe et l’automobile.
Ce dernier donnait cependant des signes d’essoufflement bien avant la crise sanitaire actuelle. Pour la première fois depuis les années 1990, le marché automobile chinois avait ainsi déploré une baisse de ses ventes en 2018 (-2,8%). La tendance s’est fortement accélérée l’an dernier, avec une contraction de 8,2%, et tout indique désormais que le recul de 2% sur lequel les spécialistes tablaient au titre de 2020 il y a encore quelques semaines sera davantage marqué.
Implanté en Chine depuis 1992, PSA subit lourdement de cette tendance de fond. Les ventes du groupe n’ont de cesse de se replier depuis cinq ans et il n’en a dénombré que 117 000 en 2019, contre 740 000 en 2014.
Dans ce contexte, la direction a décidé de frapper fort cet été, annonçant la suppression de la moitié de ses effectifs dans l’empire du Milieu, soit 4 000 emplois, la fermeture d’une usine (sur les quatre que PSA compte dans le pays) et la location d’un autre site à d’autres constructeurs. Elle se veut néanmoins rassurante, comme en témoignent les propos d’une des porte-paroles du groupe : « Nous n’abandonnons pas la partie. Nous poursuivons la mise en œuvre de notre plan d’action visant à faire baisser les coûts fixes. »
Dans l’immédiat, il est néanmoins à craindre que l’ensemble des sites de production du constructeur, qui a donc nettement réduit la voilure dans le pays, voient leur fermeture prolongée sur décision du gouvernement.
Une stratégie à repenser
Un désagrément supplémentaire dans un contexte de désaffection assez profonde des consommateurs chinois. Celle-ci, à en croire le directeur de l’observatoire Cetelem (qui étudie les tendances de consommation automobile), s’expliquerait par l’incapacité de PSA à avoir anticipé le boom des utilitaires. « Les Chinois, comme les Européens et les Américains, n’échappent pas à la mode du SUV. Or, la demande locale a évolué et beaucoup de Chinois ne sont plus des primo-accédants, ils en sont à leur deuxième voire à leur troisième voiture », détaille Flavien Neuvy, directeur de Cetelem.
La donne est quelque peu différente pour Renault, qui n’a pénétré le marché chinois qu’en 2016 avec une stratégie claire : porter l’accent sur son savoir-faire dans le segment des utilitaires et miser sur l’essor des ventes de véhicules électriques, qui doublent chaque année et pourraient représenter un cinquième du marché automobile chinois à horizon 2025.
Le dernier salon de Shanghai a du reste plébiscité le K-ZE, un petit SUV citadin électrique, développé et produit sur place, élu meilleur véhicule électrique par la presse locale.
La « caste » des modèles zéro émission demeure néanmoins très fermée, avec des constructeurs chinois qui proposent des opus plus abordables, comme BYD et Geely, et contrôlent quelque 90% du marché national. La fenêtre de tir de constructeurs plus renommés comme PSA, Ford et General Motors s’en trouve de facto réduite. En outre, la réduction de moitié des subventions octroyées aux acheteurs de véhicules « verts » a déjà donné lieu à une forte érosion de leurs ventes.
« Tant que les Chinois conserveront l’appétit pour les crossover et les SUV, les constructeurs auront encore de beaux jours devant eux », tempère Flavien Neuvy. Et de poursuivre : « ce sont en effet les modèles qui permettent aux fabricants de faire les plus grosses marges. La demande est telle sur ce segment que les constructeurs n’ont même pas besoin de casser les prix. »
Dans ces conditions, qui sait si l’électrique, si souvent décrit comme l’avenir de l’automobile, n’a peut-être pas déjà mangé son pain blanc.
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