La Fed a publié le compte rendu de son livre beige la semaine dernière. Ce livre beige contient des informations plutôt empiriques sur les conditions économiques.
Empiriques ? Oui, car ces comptes-rendus rassemblent les discussions et interviews des banques fédérales avec quelques grands pontes de l’industrie, économistes et spécialistes des marchés. Pas de chiffres, pas de statistiques, juste un sentiment global. Encore un indicateur « sentimental », comme le sont les indices de confiance des ménages, des chefs d’entreprise, des investisseurs…
◊ Sur une échelle de 1 à 10, vous êtes de bonne humeur de combien ?
Etrange cette manière de noter les sentiments, intuitions, état d’esprit… mais surtout d’en faire part comme étant des chiffres scientifiques sur lesquels les marchés vont réagir. Heureusement que je ne suis pas interrogée parce que sinon, les marchés risqueraient de réagir en fonction des saisons, de la soirée que j’ai passée ou des factures que j’ai à payer. Vous avez déjà réussi, vous, à quantifier votre degré de bonne humeur, de confiance en l’avenir « en absolu » ? Allons un petit effort… sur une échelle de 1 à 10, notez votre sentiment amoureux, votre confiance en l’avenir de votre couple…
Mais passons. Ce qui nous intéresse ici, c’est que de la même manière que le sentiment global des leaders économiques est plus important que la réalité… sur les marchés, l’état d’esprit des intervenants est plus important que la réalité financière.
◊ Une économie moribonde, des indices au plus haut
La réalité est que les ventes au détail restent « stables », la demande de crédit reste faible, le marché de l’emploi est anémique, les investissements industriels ont « légèrement tendance à s’améliorer » (vous noterez la précision du communiqué de la Fed, cette grande institution). La réalité, c’est que les dirigeants américains du secteur automobile qui ont été interrogés avouent que l’effet des primes à la casse (qui, aux Etats-Unis, n’auront coûté que 81 milliards de dollars aux contribuables) et autres coups de pouce ne devraient être… que provisoires. Ah bon ?
Rien de neuf donc. Nous savons bien que les secteurs qui montrent des signes de croissance sont ceux dopés aux aides gouvernementales. Et c’est exactement la même chose chez nous.
◊ Et pourtant, et pourtant les marchés continuent de grimper
Le CAC40 a clôturé à un plus haut depuis un an (depuis la mi-octobre 2008 environ). Même si nous n’avons pas forcément l’habitude de traiter du pourquoi mais plutôt du comment dans ces lignes, la question nous agace. POURQUOI le marché s’entête-t-il à monter alors que, malgré quelques faibles et ridicules signes de « mieux », L’ECONOMIE NE VA PAS BIEN !
Bien. Reprenons nos esprits et ne nous énervons pas pour si peu. Après quelques instants de profonde et intense réflexion (si vous avez une idée à ce sujet, vous pouvez m’écrire à billetdutrader@publications-agora.fr), nous n’avons trouvé qu’un élément de réponse — si l’on exclut, mais nous y reviendrons, toute théorie de manipulation boursière et que l’on oublie qu’une grosse institution financière dont les initiales sont G.S représente à elle seule autant (40%) que les cinq plus gros intervenants quotidiens.
Pourquoi les marchés montent-ils ?
Réponse, donc : les marchés montent parce que les marchés montent.
Et là, nous avons résumé en une brillante phrase toute la psychologie d’un marché boursier.
Tout le monde veut absolument participer au rally. Il n’est même pas question de savoir si les actions sont un peu bon marché, bon marché, ou carrément bon marché en ce moment. Ce n’est pas non plus parce que la croissance ou les rendements des entreprises justifient aujourd’hui de payer jusqu’à 20 fois les bénéfices. Ce n’est pas qu’elles vaillent la peine d’être achetées
Non.
Les investisseurs veulent acheter parce que les actions montent.
Mais nous verrons cela en détail dès demain, et nous verrons aussi s’il y a de bonnes raisons d’acheter en ce moment.