Les indices boursiers sont grandement perturbés par les événements actuels. Et ce n’est pas le DAX40 qui dira le contraire. Philippe Béchade passe à l’analyse.
Les places européennes ont enregistré ce 9 mars leur plus forte hausse depuis le 23 mars 2020 (+9,2%), avec une progression moyenne de 7,4%.
La seconde plus forte hausse remonte au 9 novembre 2020 avec +6,4%, puis au 17 mai 2020 avec +5,1%.
Ces trois précédentes envolées trouvaient leur justification, soit dans une initiative spectaculaire d’une banque centrale (la BCE étendant le gisement du PEPP aux émissions « corporate »), soit dans le soudain espoir de la mise au point d’un « vaccin » (les essais de la phase 2 ayant été concluants), puis six mois plus tard dans l’annonce du lancement d’un traitement ARN d’une efficacité à peine croyable de 95%. C’était évidemment trop beau pour être vrai : ce ratio miraculeux souffrait de nombreux « biais » et omissions, mais le marché ne voulait surtout pas le remettre en cause.
Bref, contrairement aux trois poussées haussières majeures de 2020, le rally de ce 9 mars ne s’appuyait pas sur des avancées diplomatiques concrètes sur le dossier ukrainien, ni sur une baisse d’intensité des opérations militaires, ni sur une remise en cause des sanctions ayant entraîné l’explosion des prix du pétrole, du gaz et des matières premières, ce qui pénalise lourdement la première économie européenne : l’Allemagne (bien plus que la France, pays largement désindustrialisé).
Les algos deviennent fous…
Et c’est le DAX40, le baromètre de la Bourse de Francfort qui a surclassé les autres places européennes ce 9 mars avec un écart de 7,9%, l’écart le plus considérable survenu depuis les 10,2% du 23 mars 2020.
Compte tenu de l’absence de toute « nouvelle », les opérateurs invoquaient l’absence de mauvaises nouvelles. Cela pouvait justifier une pause dans la baisse, éventuellement quelques rachats de vente à découvert, mais pas une séance à +4% (score à la mi-journée) et en aucun cas une sorte de « krach à la hausse » de +8%.
La plupart des spécialistes des produits dérivés ont admis que ces rachats s’apparentant au mode FOMO (ou « Fear Of Missing Out », peur de rater le train de hausse) sont très majoritairement le reflet d’un emballement algorithmique d’une violence jamais observée… ce que quelques opérateurs qualifient de « hausse imbécile » et qui constitue le symétrique de bien des « baisses imbéciles » survenues sans aucune raison que des programmes de trading mal calibrés par le passé.
Car, il faut le répéter, les précédentes hausses de +5, +6,5%, +9% étaient étayées par du « fond », un bouleversement – positif – des perspectives évident.
La seule véritable « info » du jour, c’est la décision de la Russie de stopper les exportations de matières premières à destination des pays ayant imposé des sanctions pour une durée de 2 ans : pénuries et flambée des cours garanties sur la durée viennent s’ajouter à un contexte déjà follement inflationniste (+7,5% d’inflation fin 2021, en l’absence de tout conflit majeur ou en gestation).
Cela aurait dû calmer les ardeurs, mais c’est comme si les « machines » (algorithmiques) avaient pris les rênes et décidé de ne tenir aucun compte des turpitudes du monde tel que nous le vivons.
Le cas du DAX40 est particulièrement saisissant puisqu’il symbolise le paroxysme de la démesure, avec plusieurs coups d’accélérateur de +1 à +1,5% en 2 ou 3 minutes en intraday… toujours reliés à aucun « fait d’actualité ».
Au final, le DAX40 réussit plusieurs exploits au sein de la même séance :
- gagner plus de 1 000 points en une séance (contre 900 points le 24 mars 2020),
- refermer le gap des 13 669 points (du 3 mars),
- refranchir l’ex-record absolu des 13 795 points, finir à 13 848 points,
- gagner 150 points de plus une heure après la clôture pour tester l’ex-plancher du 24 février.
Soit +9,2% cumulé, et 8 séances de repli effacées.
L’autre exploit, c’est un gain de 1 410 points en 48 heures : à 14 400 points, le DAX40 retracerait de 50% la totalité de sa baisse depuis le doublet-top des 16 280 points des 18 novembre 2021 et 05 janvier 2022. Mais il pourrait aussi bien retracer 50% du segment haussier des dernières 48 heures et retomber vers 13 140 points, voir combler le « gap » des 13 106 points du 8 mars..
