Si, comme moi, vous suivez de très près l’actualité des grandes capitalisations, vous avez dû remarquer que les augmentations de capital sont particulièrement rares actuellement. À qui la faute ? Probablement aux conditions désormais absolument idéales sur les marchés obligataires qui permettent aujourd’hui aux entreprises de trouver des financements plus qu’intéressants sans avoir à diluer leur actionnariat ou leur contrôle de la société.
Vous vous doutez bien que, avec des obligations à 10 ans de l’État français autour des 1,13%, les sociétés hexagonales n’ont aucune difficulté à obtenir des conditions de crédit. C’est ainsi que, par exemple, Schneider (FR0000121972 SU) a levé quelque 800 Mns€ sur le marché obligataire mercredi dernier, et ce avec un coupon annuel de 1,5% sur 8 ans. Autrement dit, le groupe français versera sur cette opération 12 M€ par an d’intérêt. Une goutte d’eau par rapport aux 1,9 Md€ de bénéfice net dégagé par le groupe en 2014 par exemple.
Pour les investisseurs, obtenir un coupon de 1,5% par an n’est pas exceptionnel, on peut même se demander pourquoi accepter un rendement si faible. À vrai dire, il faut bien comprendre que ce taux, bien que particulièrement bas, reste tout de même plus intéressant qu’un placement en monétaire ou en emprunts d’État. Étant dans sont dans une logique de recherche de sécurité, les investisseurs cherchent seulement à faire mieux qu’un taux classique d’emprunt d’État tout en étant assuré du remboursement, une fois arrivée l’échéance. Voilà pourquoi, aujourd’hui, quand une grande entreprise décide de lever de la dette, elle est sûre de trouver des financements, et réussi même depuis quelque temps le placement de ses titres en quelques heures. Cette demande frénétique pour des emprunts obligataires touche réellement tous les secteurs d’activité.
Pour vous en convaincre, jetez un oeil sur Icade (FR0000035081 ICAD), par exemple.
La foncière immobilière vient de lever 500 M€ à 7 ans avec un coupon annuel de 1,875%. Cette levée de fonds servira à améliorer le coût moyen de la dette et à rallonger sa durée de vie moyenne. Il s’agit donc d’un emprunt à visée financière plutôt que commercial ou industrielle. En effet, les entreprises, émettent aujourd’hui des obligations non seulement pour financer des projets mais aussi pour améliorer leur profil de dette. Concrètement, on va donc chercher à lever de la dette pour rembourser une dette passé émise – nécessairement, vu les actuels taux des Bons du Trésor –à des taux plus élevés.
Comme si vous, en tant que particulier, empruntiez de l’argent à des conditions de crédit avantageuses pour rembourser, grâce à ce récent afflux financier, un ancien emprunt obtenu avec des taux plus élevés.
Au vu de la conjoncture, il reste bien difficile pour l’instant de prévoir un retournement du marché obligataire. Il n’y a pas encore d’inflation et le QE mis en place par la BCE ne plaide absolument pas en faveur d’un renversement des anticipations sur la courbe des taux. De sorte qu’on est sans doute encore pour de longs mois dans une ère de financement facile à condition bien entendu d’avoir la taille critique pour séduire les investisseurs.