Sébastien Duhamel revient en force… Après une période aussi troublée que les marchés, notre spécialiste a réajusté sa stratégie et les gains pleuvent : 20%, 55,49%, 23,53%, 40%… 71,43% !
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La scène se passe aux Etats-Unis dans une région montagneuse et boisée du Montana, à une centaine de kilomètres au nord-ouest de Washington. Le cadre est bucolique mais austère et sous haute surveillance. S’y sont réunis les souverains des huit nations les plus puissantes de ce monde auxquels se sont joints les deux éternels eurocrates de service (Barroso et Van Rompuy) dont personne ne comprend encore aujourd’hui le rôle véritable.
L’hôte de ces lieux a convié ses pairs à une séance très particulière. Après les avoir reçus chaleureusement, il les fait s’asseoir autour d’une grande table en pin ponderosa, l’arbre du Montana, faite pour huit convives mais à laquelle deux strapontins ont été ajoutés pour ces deux berniques qui s’inscrutent à tous ces G quelque chose. Pour la circonstance, l’hôte des lieux a fait venir d’outre-Atlantique un souverain, fraichement intronisé, et porteur d’une vision – que dis-je, d’une solution pour tous les maux qui hantent notre avenir. Ce dernier les enjoint tous à poser les mains sur ce magnifique plateau en pin ponderosa brut et à invoquer avec lui l’esprit de la croissance. Après quelques minutes de concentration les souverains, yeux mi-clos, entonnent ensemble une longue litanie : « croissance, croissance… es-tu là ? »
Barack – l’hôte des lieux – n’est pas peu fier. Cette vision qui est apparue à François II – c’est le nom de ce souverain frais émoulu –, Barack lui-même l’avait eue à une époque. Mais jusqu’alors il était bien seul dans cette voie. Personne n’avait cru en sa recette de l’autre côté de l’Atlantique où une vilaine sorcière sévit et prône l’austérité.
Pourtant, et selon lui, les chiffres de Barack parle en sa faveur. Prenez l’emploi par exemple. Le taux officiel du chomage américain publié par le BLS du 4 mai s’établit pour avril 2012 à 8,1% alors qu’un an plus tôt il était de 9%. Bel exploit non ? Bon, évidemment, les fâcheux dans mon genre vont aller voir un peu plus loin derrière les chiffres et découvrir que ces pourcentages sont calculés à partir de la seule population de travailleurs inscrits.
En avril 2011, ils étaient 13 792 000 et sont « seulement » 12 500 000 aujourd’hui. En apparence ces chiffres sonnent agréablement. Néanmoins, dans le même intervalle, beaucoup de travailleurs ont jeté l’éponge et ne se présentent plus dans les agences du DOL. En avril 2011, 85 726 000 Américains étaient comptabilisés hors de ces statistiques ; un an après ils sont 88 419 000 soit près de 2 700 000 de plus.
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En résumé vous avez d’un côté près de 1 300 000 chômeurs officiellement inscrits en moins mais, de l’autre, vous avez 2 700 000 personnes supplémentaires qui sont venues s’ajouter à celles qui sont exclues du monde du travail et des statistiques. « Le modèle de croissance américain serait donc un leurre ? » s’interroge alors François II ? « Pourtant », continue-t-il, « les entreprises américaines affichent toutes des résultats mirobolants. C’est donc bien le signe que le modèle américain pour sortir de cette crise fonctionne ».
En effet les entreprises affichent toutes des résultats importants. Mais encore une fois que se cache-t-il derrière les chiffres ?
Pour en avoir le coeur net, décomposons ce résultat pour tenter de comprendre comment il s’est construit.
L’équation de Kalecki détermine que les profits sont égaux aux investissements + les dividendes auxquels est retranchée l’épargne des acteurs économiques (ménages, Etat et étrangers). Les statistiques de la Réserve fédérale américaine sont très détaillées et permettent de construire un historique de la décomposition des profits des entreprises en pourcentage du PIB des Etats-Unis.
Traditionnellement les profits des entreprises s’appuient sur deux piliers : l’investissement et les dividendes. Comme le tableau ci-dessous le montre, à partir de 2008 l’un des piliers s’est rompu. Entre 2007 et 2011 l’investissement en pourcentage du PIB a été divisé par 3. Dans le même intervalle, la part d’épargne des ménages s’est reconstituée accentuant les effets de l’effondrement de l’investissement. Pourtant, de 2007 à 2011, le niveau des profits est resté à peu près le même puisqu’il approche 11% du PIB en 2011. Par quel tour de magie ceci a-t-il été rendu possible ?
Les chiffres ne mentent pas : ce maintien des profits est le résultat d’un effort colossal « d’épargne négative », c’est-à-dire de déficit, de la part de l’Etat fédéral. Entre 2007 et 2011, cet effort a été multiplié par 5. Sans ce déficit budgétaire sans précédent le niveau de marge des entreprises serait sans commune mesure avec la situation actuelle.
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Sachant que ce déficit annuel de plus de 1 000 milliards de dollars nourrit inlassablement l’endettement astronomique* des Etats-Unis, la question qui vient (ou devrait venir) naturellement à l’esprit est : combien de temps ceci peut-il encore durer ?Certains vont dire que si le gouvernement américain – pardon le contribuable américain – ne subventionnait pas artificiellement les entreprises, celles-ci auraient licencié encore plus. C’est vrai. Mais cette situation ne résoud rien du problème de fond.
Bien au contraire, elle construit inéluctablement une bombe énorme sous les pieds de tous les contribuables.Lorsque cette bombe éclatera, car elle éclatera soyez-en certain, la situation des entreprises et des contribuables sera sans commune mesure avec ce qu’elle aurait pu être si des décisions courageuses avaient été prises dès le départ. Plus le chirurgien tarde à intervenir, plus il est obligé d’amputer haut. Parfois le patient n’y survit pas.Je ne sais pas si l’esprit de la croissance leur est apparu et a fait tourner cette magnifique table en pin ponderosa. J’espère sincèrement que l’esprit de la raison a pris le dessus et leur a répondu « il est grand temps d’arrêter vos bêtises ! »
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* La dette fédérale s’élève aujourd’hui à 15 713 milliards dont 11 000 sont détenus par les marchés. Pour comparer l’endettement américain avec celui des États européens, il convient d’y ajouter les dettes sociales (retraite et santé), les dettes des États et des collectivités locales composant l’Union sans oublier les dettes de Fannie Mae et Freddie Mac, organismes nationalisés et sous perfusion régulière de liquidités.