Beaucoup d’économistes se retrouvent bien en peine non pas d’expliquer le rebond technique des marchés après un krach tel que celui de 2008, mais plutôt pourquoi il n’aura fallu cette fois que 6 mois pour égaler une performance qui aura été réalisée en 16 mois entre octobre 2002 et février 2004. Zoom sur ce rebond qui bat de l’aile donc.
◊ Le SSE : le grand saut
Les Etats-Unis jouissaient à l’époque d’un système bancaire en pleine santé et les consommateurs s’efforçaient de dépenser autant d’argent avec leurs cartes de crédit que le Pentagone avec la guerre en Irak et en Afghanistan.
Bien entendu, ni le gouvernement Bush ni les salariés américains ne possédaient le premier dollar pour financer une guerre impériale ou rembourser l’encours de leurs cartes de crédit. Mais la Chine avait les poches profondes et pouvait se permettre de ramasser tous les bons du Trésor émis par la Fed — avec des dollars tout aussi fraîchement imprimés.
Tant que les excédents commerciaux en dollars s’accumulaient, ce carburant liquide alimentait une envolée de la Bourse de Shanghai, qui est passée de 1 000 à 6 000 points en 27 mois de juillet 2005 à octobre 2007. Une hausse d’un petit 500%, en quasi-ligne droite.
Lorsque la bulle du crédit a explosé chez son principal client, les Etats-Unis, la bulle boursière a également explosé à Shanghai (en octobre 2007) et il n’a fallu qu’un an pour que l’indice phare repasse de 6 125 points à 1 665 points.
◊ Pékin nous a leurré
Mais bien avant que les indices américains ou que les places européennes anticipent les effets bénéfiques des plans de relance occidentaux, la Bourse chinoise a doublé de valeur entre début novembre 2008 et août 2009 (le SSE culminant vers 3 450 points).
Sauf que la mécanique haussière s’est enrayée sur le SSE depuis deux mois. L’indice chinois reperdait 20% tandis qu’une spirale haussière emportait le Dow Jones vers les 9 900 points et le CAC40 de 3 500 à 3 850 points.
Dans le même temps, le dollar dégringolait de 1,40 jusqu’à 1,475 euro, et s’est enfoncé sous les 90 yens. L’empire du Milieu est maintenant convaincu de s’être fourvoyé et s’empresse de convertir ses billets verts en actifs tangibles (comme des exploitations minières en Afrique ou en Australie). Pékin faisait juste semblant de croire en la signature des Etats-Unis depuis 2003, sachant que tant qu’elle agirait ainsi, le reste de la planète ferait de même.
◊ Un nouveau Lehman Brothers est sur le point d’exploser
Mais avec la mise en liquidation imminente de CIT (le principal financier des PME et du commerce de détail aux Etats-Unis), c’est un second Lehman affectant directement le coeur de l’économie réelle américaine qui se profile, avec des conséquences négatives incalculables pour l’emploi et la consommation au cours des prochains mois. Et ça, les investisseurs chinois le savent depuis le milieu de l’été — lorsqu’un plan de sauvetage a été mis en place pour éviter la faillite immédiate de la banque CIT.
Au final, l’investisseur chinois se montre beaucoup plus réaliste que « nous » depuis fin 2007 : il anticipe avec en moyenne deux mois d’avance les mouvements boursiers de Wall Street, de Londres et de Paris… La mise en parallèle du S&P500 et du SSE en apporte une démonstration saisissante. Regardez.
La configuration qui se dessine sur le graphique de la Bourse de Shanghai s’apparente à l’ébauche d’une classique correction en A-B-C, qui serait validée par une cassure des 2 640 points (plancher du 1er septembre).
Le SSE peine désormais à refermer le gap des 2 812 points et menace d’enfoncer le support oblique des 2 750 en direction des 2 400 points (seuil pivot majeur moyen terme).
Il subsiste un mince espoir d’échapper à cette issue négative, mais il faudrait pour cela que Shanghai refranchisse le palier de résistance court terme des 3 065 points qui coïncide avec la MM50.
◊ Si le S&P réplique le SSE, nous irions sur les 900 points
Si le scénario reste celui d’une correction en A-B-C sur le SSE, il faudrait alors s’attendre à ce que le S&P500 rechute à son tour en direction des 900 points (et le CAC40 sur les 3 250 points) au cours des deux prochains mois, ce qui permettrait de disposer d’un petit peu de temps pour « rattraper » le coup fin décembre — habillage de fin d’année oblige — pour terminer à proximité des 1 000 points sur le S&P500…
Mais si l’on suit ce scénario, cela nous emmènerait donc sur une nouvelle rechute de 15% supplémentaires à partir du mois de février 2010.Le rally était bel et bien terminé en Chine… Il nous faut deux mois pour nous en rendre compte… Mais déjà, ça recommence.