Hier, les marchés ont vu rouge.
Voici l’ambiance hier sur mes écrans : les composantes du SP500 par secteur… Joli, non ?
La faute à une malheureuse tricherie automobile qui a entraîné tout un secteur dans la déprime…
Si l’on écarte l’amende record que risque Volkswagen, pensez-vous que ce genre d’incident pousse les automobilistes à rouler en vélo ? Moi je ne le pense pas, donc la baisse du secteur entier est totalement irrationnelle… sauf à penser que toutes les marques puissent être dans le viseur, sachant que le logiciel incriminé était potentiellement compatible avec toutes les marques … Non, attendez… Une tricherie mondiale ? Un secret de polichinelle connu de tous les constructeurs ? Vous devenez parano à force de lire cette chronique, je trouve !
M’est avis que les soubresauts de cette histoire n’en sont sans doute qu’à leur début…
Mais je m’égare, pardon.
Une croissance de « seulement » 6.9%
Mais avouez que justifier la baisse des marchés par cet épiphénomène – qui est toutefois un incident industriel d’envergure – serait trop simple. Et l’un des traders qui travaille avec moi me l’a rapidement signalé hier.
La vraie raison de la baisse, c’est cette dépêche Reuters tombée à l’ouverture des marchés futures : « Chine – Un organisme proche du pouvoir voit une croissance de 6,9% ».
Ici, ce n’est pas tant le 6,9% qui importe que la notion de « proche du pouvoir ». Les inquiétudes montent et le gouvernement chinois va devoir lâcher un peu de lest dans son discours pour préparer le terrain de l’opinion : Oui la croissance chinoise ralentit !
On le savait tous, mais le fait que cela devienne quasi-officielle fait craindre une situation pire que celle anticipée.
Mais, encore une fois, je vais trop loin. Je m’égare.
Les indices dans la tourmente
Du CAC40 au Nikkei en passant par le DAX, sans doute le plus impacté (voir l’analyse de Philippe Béchade, vendredi dernier, et celle de Gilles Leclerc qui suit), les indices reviennent dans les zones testées cet été lors de l’éclatement de la bulle chinoise.
Après une journée à sens unique et avec un calendrier très mince qui n’a pas pu donner de catalyseurs rassurants aux intervenants, les choses sérieuses vont réellement commencer ce mercredi.
Cette nuit déjà, l’indice manufacturier mesuré par la banque Caixin a montré une véritable faiblesse sous le consensus déjà peu optimiste à 47 pts. C’est-à-dire sous la fameuse zone d’expansion.
Plus tard dans la matinée ce seront les indicateurs PMI en France, en Allemagne et dans toute la zone euro. Mais comme le dit mon collègue Philippe Béchade :
« Vu le contexte boursier écrasé par l’affaire Volkswagen, les chiffres conjoncturels passent un peu inaperçus… et cela vaut mieux car ils ne sont pas bons : le PMI composite de la zone euro recule à 53,9 contre 54,3 points en août, le PMI des services s’établit a 54 contre 54,4, le PMI manufacturier à 52 contre 52,3. Le PMI composite allemand recule de 55 vers 54,3 et celui qui concerne l’industrie retombe vers 52,5 contre 52,8 ».
En France, le PMI manufacturier a été en dessous des attentes 9 fois sur les 12 derniers mois et… une seule fois au-dessus de la zone d’expansion ! En Allemagne, l’indice n’a été que deux fois sous les 50 pts sur la même période.
C’est dire si un éternuement chinois pourrait faire plonger la locomotive de l’Europe et toute la zone euro derrière elle.
On peut reprocher à l’Allemagne d’avoir tourné son industrie vers le tout export et principalement vers la Chine, mais elle a au moins bénéficié de cette manne et peut voir l’avenir avec un peu plus d’assurance.
La France, coincée dans son idéologie, n’a pas profité de ce bond de l’Asie et va pourtant, comme tout le monde, subir les conséquences de l’éclatement de la bulle par l’effet de la mondialisation… Bref, double peine.
Mais je m’égare. Revenons à nos moutons.
Dans le sens du vent tu analyseras
C’est le cas de le dire, tant les analyses s’adaptent à la tendance.
Donc depuis quelques jours, nous voyons à nouveau fleurir les projections baissières concernant la parité entre l’euro et le dollar. Je crois même avoir aperçu un cours objectif à 0.98 $ pour 1 € chez Bank Of America.
Et c’est là que la suite de la journée risque d’être intéressante avec Mario Draghi qui interviendra depuis Bruxelles (à 15 H). Il ne devrait pas y annoncer quoique ce soit, mais nous pouvons compter sur lui pour continuer la « japonisation » de la zone euro.
En effet, lui et ses lieutenants ont eu à cœur de freiner les ardeurs de l’euro et de rassurer les marchés : Le dealer est encore là et la came de première qualité ! (Excusez-moi, je m’égare à nouveau…)
Mais, on doit reconnaitre que Draghi, d’habitude si habile et fin en rhétorique, n’a pas fait dans la dentelle lors de ses dernières interventions. « Tout ce qui possible sera fait », « les mesures d’assouplissement dureront le temps qu’il faudra », etc.
Et pour faire taire les mauvaises langues qui s’inquiétaient de voir des problèmes de liquidités des opérations de rachats, on a élargi le champ des possible en s’autorisant à racheter à peu près tout… pourvu que ça passe ! Il faut dire que 80 Mds€ par mois, ce n’est pas discret, discret, Mario : on va commencer à voir que ces QE ne servent vraiment pas à grand-chose.
Oui, car comme je l’ai déjà dit dans ces lignes, une opération de quantitative easing n’est terminée et donc potentiellement réussie que quand les sommes injectées ont été stérilisées, c’est-à-dire retirées d’une manière ou d’une autre du circuit. Et là, il y a un os car on n’a jamais vu un quantitative easing se terminer…
Les marchés en overdose
Et ça ne suffit plus.
Les marchés ont adoré les injections japonaises et ont été envoutés par les doses américaines mais, il faut l’avouer, on dirait bien que la dope européenne n’est pas du même gabarit.
Ci-dessus, le graphique de l’Eurostoxx50 qui passe en négatif sur un an et depuis le 1er janvier est à -2.24%. Les marchés sont en phase d’overdose avec un besoin de désintoxication. Il semble loin le temps où un simple mot d’un banquier central faisait bondir les actions sur de nouveaux plus haut.
Le paradigme a changé et la zone euro est à la traîne.
Techniquement, les indices ont confirmé l’arrêt du biais haussier qui était le leur depuis 3 ans maintenant.
Comme vous pouvez le voir sur le DAX ci-dessous, nous avons même une nette accélération de la correction. Désormais, tant que l’indice allemand restera sous 10 545 Pts, le biais vendeur restera à privilégier.
Attention tout de même : rien ne sert de parier sur la fin du monde. Ce qui est certain, c’est que ce sera la volatilité qui sera la grande gagnante des prochains mois (voir analyse du VIX ici). Il vous faut donc protéger convenablement vos portefeuilles et vous intéresser à des stratégies plus dynamiques afin de profiter de l’amplitude des mouvements actuels et surtout à plus court-terme tant les perspectives sont floues dans un sens comme dans l’autre.
L’incertitude apportée par « non-décision » de la Fed, la course en avant des banquiers centraux et les manœuvres des producteurs de matières premières n’est jamais de bon présage.
Bref, finalement, ce n’est peut-être pas moi qui m’égare … mais les marchés qui ont perdu leur boussole.
Bons Trades