La communauté financière l’avait largement anticipé et elle s’est exécutée. Pour la deuxième fois cette année, la Fed a relevé hier ses taux directeurs de 25 points de base. Ce faisant, le taux des Fed Funds atteint désormais 2,00% et se rapproche du niveau de l’inflation.
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La bonne santé de l’économie américaine (même si des indicateurs récents ont donné des signes d’essoufflement) et en particulier celle du marché de l’emploi (le taux de chômage atteint 3,8% au dernier pointage début juin, du jamais vu depuis un demi-siècle !) présage de deux nouveaux tours de vis d’ici la fin de l’année.
Or la BCE devrait aussi s’orienter dans cette voie.
La banque centrale européenne devrait en effet annoncer tout à l’heure l’arrêt de son QE. Lancé en mars 2015, à alors que l’économie de la zone euro était amorphe, il n’a plus lieu d’être aujourd’hui. La BCE avait déjà commencé à réduire ses rachats d’actifs à hauteur de « seulement » 30 Mds€ par mois (contre 60 Mds€ au lancement du QE). Un facteur majeur de la hausse des marchés actions va donc disparaître avant la mise en place, dans les pas de la Fed, d’une hausse des taux de la BCE, sans doute à l’été 2019.
Reste maintenant à mettre les formes…
▶ La Fed réfléchit à systématiser ses conférences de presse
Les marchés sont en effet très sensibles à la communication des institutions monétaires. A ce jeu, Mario Draghi s’est presque toujours montré habile et à son avantage, laissant invariablement la porte ouverte à des dispositions accommodantes. Dès lors, je vois mal le président de la BCE adopter brusquement un ton « hawkish » sans accorder un minimum de gages aux colombes.
Il ne lui a en outre pas échappé que plusieurs statistiques récentes – je pense notamment aux PMI européens qui ont révélé un ralentissement de la croissance ; au volume des ventes de détail en avril, qui a à peine progressé ; et à l’indice ZEW qui s’est littéralement effondré ce mois-ci – ne sont pas des plus rassurantes.
De même, ce processus de normalisation intervient dans un contexte politique particulier avec l’avènement en Italie d’un gouvernement « infesté » d’eurosceptiques : Mario Draghi va une fois de plus devoir la jouer (très) fine et veiller à ce que le message reste acceptable… et ne donne pas le sentiment aux investisseurs que les facteurs anxiogènes sont minimisés, voire occultés.
Maîtriser la communication semble aussi être devenu un impératif pour la Fed. A en croire le Wall Street Journal, Jerome Powell envisagerait d’accorder une conférence de presse après chaque réunion du comité de politique monétaire de l’institution. Actuellement, cette conférence de presse a lieu une réunion sur deux, et c’est uniquement durant ces conférences de presse que les hausses de taux sont annoncées…
Une petite révolution quand on sait qu’il y a encore 25 ans, la Fed n’annonçait même pas officiellement ses remontées de taux…
L’effort pédagogique aurait été soufflé à Jerome Powell par plusieurs de ses collègues, séduits par son style de communication direct. Il aurait surtout le mérite de renforcer les contacts avec les intervenants et de dissiper la cacophonie née des diverses prises de position de membres de la Fed.
En supposant que le nouveau patron systématise ses conférences de presse, la Fed suivrait aussi l’exemple de la BCE. Comme quoi, tout peut arriver…