La séance de mardi a ressemblé à un véritable champ de mines, avec des cours de Bourse qui se sont désintégrés en cascade au sortir de publications jugées décevantes. Celle d’hier a quant à elle été un traquenard pour des bulls tentés de jouer le rebond, appâtés qu’ils étaient par quelques chiffres trimestriels bien accueillis et l’espoir que le CAC40 reprendrait appui sur les 4 950 points.
L’indice venait alors d’inscrire un plus bas depuis le 8 mars 2017 et il rouvrit très opportunément au-dessus de l’ex-plancher des 4 980 points inscrit à la veille du premier tour de la présidentielle.
C’était le scénario parfait, avec en prime une envolée de 10% de Kering (FR0000121485-KER), qui ne décèle pas de signes de ralentissement de ses ventes en Chine et revendique une envolée de 35% du chiffre d’affaire de Gucci. Bonnes surprises également avec Safran (FR0000073272-SAF), sa filiale Zodiac Aerospace ayant retrouvé son altitude de croisière, et avec Vinci (FR0000125486-DG), qui a confirmé ses ambitions annuelles, aussi bien en termes de chiffre d’affaires (+9,5% contrairement à son concurrent Bouygues qui stagne) que de résultat opérationnel.
Ces deux titres ont rapidement engrangé jusqu’à 8% et une vivifiante brise haussière a propulsé le CAC40 jusque vers les 5 043 points (+1,5%) à une heure de la réouverture de Wall Street. Cela fleurait bon la hausse de 2% en clôture et l’effacement des pertes de la veille… et puis tout s’est détraqué !
▶ Le Dow Jones, le S&P500 et le Nasdaq ont tangué
Les bonnes dispositions des marchés actions américains en préouverture ont en effet tourné court alors que Donald Trump adressait une nouvelle volée de bois vert à Jerome Powell, accusant même le patron de la Fed « de prendre du plaisir à monter les taux ».
La suite aura été une succession de calamités pour Wall Street, avec un retournement à la baisse dès les premiers échanges, une chute des valeurs pétrolières et des GAFAM, un décrochage inattendu de 5,5% des ventes de logements neufs en septembre (à leur plus bas niveau depuis deux ans) et enfin le Livre Beige de la Fed qui a insisté sur les tensions salariales et a mentionné plus de 40 fois (1,2 fois par page !) les risques qu’une guerre commerciale et douanière prolongée font peser sur la croissance américaine.
Ce « risque » est incarné par le président américain, qui a initié une remise à plat du libre-échange et institué la pratique du bras de fer bilatéral avec la conviction que son « art du deal » allait mettre au pas tous les rivaux commerciaux de l’Amérique. Sauf que cette attitude de matamore du locataire de la Maison-Blanche ne rend pas (ou plus) serein Wall Street, mais alors pas du tout.
Résultat des courses donc : le rebond qui devait ensoleiller la séance de mercredi s’est transformé en un phénomène de « liquidation » puis de capitulation quasi-générale, caractérisée par un VIX qui a bondi de 22% à 25,20.
Et alors qu’un véritable stress s’est emparé cette fois-ci des gérants, les valeurs défensives de type utilities ou alimentation ont bénéficié d’une rotation sectorielle au détriment du secteur de la communication (-4,9%), des biotechs (-5,7%) et des semi-conducteurs (-6,7%, à la suite de l’avertissement de STMicroelectronics, qui anticipe un ralentissement de la demande en Chine).
Le Dow Jones a au bout du compte reculé de 600 points pour clôturer sous les 24 600 points, tandis que le S&P500 a cédé 3,1%. Deux baisses synonymes pour l’un et l’autre de basculement dans le rouge par rapport au 1er janvier. Quant au Nasdaq, il a lâché 4,4%, soit sa pire séance de bourse depuis le 18 août 2011…
Enfin, les trois indices ont pulvérisé leur moyenne à 200 jours avec désormais 50% de valeurs en « bear market » (plus de 20% de correction par rapport à leur sommets annuels).
Toutes les conditions semblent maintenant réunies pour qu’une correction d’une ampleur inédite s’enclenche à l’échelle planétaire. Ou alors pour que Mario Draghi rentre dans la légende des plus grands bienfaiteurs des marchés en tentant, avec son verbe magique, de mettre un terme à une série baissière sans précédent depuis 2011 (pas moins de 13 séances de repli sur 15 sur le S&P500 depuis le 3 octobre dernier).