La désormais traditionnelle analyse graphique de Philippe Béchade du jeudi est consacrée à l’indice de référence de la Bourse de Francfort, alors que l’Allemagne fait la Une de l’actualité à plusieurs égards cette semaine.
Oui, de nombreux regards sont tournés vers nos voisins d’outre-Rhin cette semaine. Et pour cause : c’est Angela Merkel qui assure la présidence tournante de l’Europe, avec de facto deux lourdes tâches, arracher un accord avec le Royaume-Uni sur le Brexit, et convaincre la Hongrie et la Pologne de se rallier au plan de relance européen de 750 Mds€ qui sera discuté tout à l’heure lors d’un sommet organisé à Bruxelles.
Un déblocage serait désormais en vue, tandis que l’ultime réunion de la BCE se tiendra au même moment. Au vu de la situation économique de la zone euro et des vives incertitudes liées aux développements futurs de la crise sanitaire, les investisseurs prophétisent une augmentation de la taille du « quantitative easing » mensuel (actuellement de 20 Mds€), le lancement de nouvelles tranches de prêts de type TLTRO (potentiellement au taux négatif de -1%) à échéance 2025, mais aussi l’ajout de 500 Mds€ au plan de rachats d’actifs obligataires « PEPP ».
Toujours plus d’argent pour doper une reprise économique qui s’essouffle, mais plus la BCE en rajoute, moins cet argent circule, tandis que la consommation se retrouve bridée par les différentes mesures de confinement destinées à lutter contre la pandémie de Covid-19.
Celle-ci paraît particulièrement tenace en Allemagne – pays cité en exemple durant la première vague –, ce qui a contraint la Chancelière, particulièrement émue dans son dernier discours prononcé devant le Bundestag, à exhorter ses compatriotes à réduire les occasions de contacts (réunions de famille, repas entre amis, événements collectifs, etc.) avant Noël afin de diminuer les risques de contamination durant les fêtes de fin d’année. Et Angela Merkel de suggérer une nouvelle fermeture des commerces « non-essentiels » début janvier, ce qui aura bien sûr un impact négatif sur la consommation et par extension sur la croissance économique.
Au surplus, et même si la presse en parle peu, une bonne partie de l’industrie allemande est en train d’accroître le recours au chômage technique. En conséquence, de nombreuses usines et chaînes de production seront complètement à l’arrêt durant toutes les fêtes cette année et tous les salariés renvoyés chez eux (au lieu d’un simple allégement des effectifs d’ordinaire).
Un contexte macroéconomique qui laisse de marbre
Pour autant, la Bourse de Francfort, comme tant d’autres, a choisi son camp entre un ralentissement économique brutal en fin d’année et un début d’année 2021 au ralenti (sur fond de surmortalité de la population), et le soutien monétaire intense de la BCE.
Pour faire simple, moins il y a d’activité dans le monde réel, moins l’argent y circule, plus celui-ci va se stocker dans les actifs financier et doper leur valorisation. Le DAX-30 n’échappe pas à cette équation et a établi hier un nouveau zénith de dix mois à 13 450 points, avant de clôturer à 13 380 points.
Alors que l’indice évolue autour de 13 350 points au moment où j’écris ces lignes, autour de 11h15, force est de constater que la résistance des 13 400 points est « soulevée », mais pas encore surmontée.
Si tel devait être le cas, le DAX-30 s’en irait refermer le « gap » des 13 500 points du 21 février. Si en revanche, il devait ricocher sous les 13 400 points après la conférence de presse de Christine Lagarde, les deux « gaps » des 12 596 points (le 6 novembre) et des 12 330 points (l’avant-veille) pourraient être refermés.
Pour l’heure, il subsiste le fol espoir d’une accélération du rally entamé le 30 octobre dernier depuis un plancher de 11 450 points et l’indice a engrangé quelque 2 000 points en à peine un mois à compter de cette date, soit la hausse de 17,5% la plus rapide de son histoire.
C’est énorme bien sûr, mais les investisseurs en redemandent… Ils sont apparemment convaincus que la BCE ne peut qu’encourager un dernier sprint des actions allemandes pour retracer le zénith des 13 785 points du 19 février dernier d’ici vendredi prochain et la prochaine séance dite des « 4 sorcières ».